Le chant xâm, parcours d’un patrimoine culturel immatériel national

Le hat xâm (chant xâm) est un art populaire original des travailleurs vietnamiens possédant de fortes valeurs culturelles comme spirituelles. Ayant presque entièrement disparu depuis plusieurs décennies, il a su reprendre de la vigueur ces dernières années.

Une représentation de "hat xâm" en plein air
Photo : Ba Linh/CVN

Autrefois, le chant xâm était habituellement interprété par des chanteurs et musiciens aveugles itinérants, qui trouvaient là un moyen de subsistance. Ils voyageaient généralement en troupe, en groupe de deux à cinq, ou en famille, et se produisaient dans des lieux publics comme les gares ou les entrées de marchés, les stations de tramway, les carrefours ou encore aux coins de rues animées.

À l’aide d’une viole à deux cordes appelée nhi et de claquettes, ces artistes de rue chantaient des airs improvisés ou puisés du répertoire traditionnel. Le hat xâm est chanté aujourd’hui par des artistes, tant professionnels qu’amateurs. Il est vraisemblablement un art folklorique dont la représentation originale incarne la vie rurale et citadine des Vietnamiens.

Art populaire original

Cet art vocal est un type de musique très spécial car il exprime un monde ''intérieur'', celui des sentiments de l’homme envers son pays natal, l’importance de la famille et l’amour conjugal, notamment. Les chansons abordent également de nombreux problèmes historiques ou d’actualité. En effet, les artistes choisissent souvent les poèmes et morceaux à l’esprit patriotique d’un peuple luttant contre les envahisseurs étrangers. À l’époque féodale, le chant xâm critiquait même les travers de la société, notamment les excès des mandarins, ou au contraire, louait les exploits des héros.

Hormis les valeurs artistiques, cet art populaire exprime également l’humanité, l’esthétique, l’éducation, la moralité et le mode de vie de toutes les couches sociales de la société. Les artistes se produisent également lors des fêtes, mariages et obsèques. Parmi les types d’arts traditionnels vietnamiens, le hat xâm est le plus simple et proche de la population. Il est devenu avec le temps un type de musique original contribuant à édifier les traits caractéristiques de la culture de tout un peuple.

Comparé à d’autres formes d’art populaire, cet art vocal joue un rôle des plus importants. Il s’agit en effet d’un canal de communication en musique très efficace. "Dès son apparition, le +hat xâm+ a toujours été une chaîne d’information musicale afin de transmettre non seulement l’amour de la Patrie mais aussi les messages d’actualité de la société, clairement exprimés au travers des chansons depuis sa création", a indiqué le musicien Nguyên Quang Long.

Le "hat xâm" est un art populaire original des travailleurs vietnamiens.
Photo : Minh Duc/VNA/CVN

En outre, le chant xâm a également participé à valoriser le courage et l’esprit héroïque des soldats. En effet, cette musique folklorique a connu son apogée dans les années 1930. Durant les deux guerres contre les Américains et les Français, ce chant et les autres arts populaires ont "accompagné" les habitants tout au long de l’œuvre de défense et d’édification du pays.

La célèbre artiste originaire de la province de Ninh Binh (Nord), Hà Thi Câu, dernière chanteuse professionnelle du hat xâm du XXe siècle, est aujourd’hui considérée comme "patrimoine" de cet art musical, et ce d’autant plus qu’il est menacé de disparition. Pour ses mérites dans la conservation des arts folkloriques, la nonagénaire s’est vu décerner par l’État le titre d’"Artiste Émérite".

Vicissitudes

Selon la légende, sous le règne du roi Trân Nhân Tông (1279-1293), le prince héritier Trân Quôc Dinh fut rendu aveugle par son propre frère Trân Quôc Toan qui voulait accéder au trône à sa place. Ce dernier l’emmena en forêt afin qu’il se fasse dévorer par les fauves. Ému par les pleurs de Trân Quôc Dinh, Bouddha apparut et lui enseigna des airs touchants, capables d’attendrir les cœurs les plus durs. Sauvé, le prince aveugle refusa de revenir au palais et choisit de passer le reste de sa vie à enseigner à son tour à tous ceux partageant le même handicap que lui. C’est ainsi que cet art musical est devenu au fil du temps, le fameux chant xâm, signifiant littéralement le "chant des aveugles".

Plus tard, le prince Trân Quôc Dinh fut vénéré comme l’ancêtre de cet art. Chaque année, afin de commémorer ses mérites, les gens pratiquant ce métier ont choisi le 22e jour du 2e mois lunaire et du 8e mois lunaire pour célébrer l’anniversaire de la carrière du chant xâm.

Au XXe siècle, chaque groupe de hat xâm disposait généralement d’un chef. Il s’agissait à cette époque-là d’un véritable métier. Les artistes jouaient de la musique et chantaient, et les spectateurs donnaient un peu d’argent, selon leurs moyens. La société considérait le chant xâm comme une profession à part entière, mais une profession pénible réservée aux plus pauvres. Et on ne peut manquer de mentionner les artistes de talent et de renoms du Nord tels que Nguyên Van Nguyên, Vu Duc Sac, Trùm Khoan, Trân Thi Thin, Nguyên Van Khôi (Hanoï), Thân Duc Chinh (Bac Giang), Nguyên Phong Sac (Hai Duong), Chanh Truong Mâu (Ninh Binh), Dào Thi Mân (Hung Yên), Trân Thi Nhon (Nam Dinh), ainsi que des artistes anonymes.

À partir des années 1960, pour des raisons diverses et variées, l’art vocal connaît un certain déclin. "Ninh Binh, en coordination avec les provinces du Nord, élabore un dossier pour demander au ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme de soumettre au Premier ministre la reconnaissance du +hat xâm+ comme patrimoine culturel immatériel national. C’est le désir de nombreux artistes et du public", a affirmé Nguyên Manh Cuong, directeur du Service provincial de la culture et des sports.

Dans un avenir proche, nombreux sont ceux qui espèrent que l’art du chant xâm soit reconnu et puisse posséder une position honorable auprès du public national comme des amis internationaux.

Mai Huong/CVN

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